Souffrance
Elle est arrivée en avance.
Je la reçois.
Et je lui pose les questions habituelles.
Comment va-t-elle ?
Quoi de neuf depuis la dernière fois que nous nous sommes vues ?
Rien.
Non pas si rien que ça.
Elle s'est enfin décidée à voir un psy.
Elle me dit qu'elle commençait à vouloir se faire du mal.
A vouloir se scarifier.
Hou la la !
Elle en a parlé à son médecin généraliste qu'elle connait depuis longtemps.
C'est lui qui a décidé qu'elle devait absolument consulté un psy.
Elle en a rencontré un premier avec lequel ça n'a pas accroché.
Elle en a vu un autre.
Avec lequel elle arrive à exprimer.
Elle a parlé de son passé.
D'un secret qu'elle porte en elle, et, qui, bien sûr, doit absolument le rester.
Personne ne doit savoir et surtout pas ses deux enfants.
Je suis à présent la troisième personne qui sait.
J'ai deviné de quoi il s'agissait.
Et j'ai compris la honte, le dégoût d'elle-même et la culpabilité qui la rongent.
Elle explique qu'elle a fait ça pour sa mère qui lui en demandait tant.
Une mère assoiffée, toujours dans le besoin.
Le besoin d'argent.
Besoin qui occulte autre chose.
Une chose sans doute toute aussi indicible que le secret.
Elle dit qu'elle ne sait pas dire non.
Encore aujourd'hui.
Sa mère la "dévore" par une torture émotionnelle.
Elle raconte que sa mère ne se comporte comme ça qu'avec elle.
La première des quatre enfants.
Que sa mère a été mariée jeune.
Un mariage "arrangé".
Je dirais plutôt "dérangé".
Elle me parle ensuite de son fils âgé de 17 ans.
Qui ne s'aime pas beaucoup en ce moment.
Et qui a commencé à développer une anorexie depuis quelques semaines.
Ce que ne peut exprimer l'esprit, le corps s'en charge.
Très bien.
Trop bien.
Trop loin quelques fois ...